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Indes réunionnaises
    

     LES RITUELS DU CAVADEE, OU FÊTE DIX JOURS

   Patrice LOUAISEL


     La ville de Saint-André est en fête. Comme chaque année, dix jours avant la pleine lune de fin janvier/début février a en effet lieu dans cette commune une magnifique célébration : le tai poussam Cavadee, en l'honneur du deuxième fils de Shiva : le dieu Mourouga, dieu de la jeunesse et de la beauté.
   La veille des dix jours se déroule une cérémonie de purification du temple et de l'âme des dévots : lavage des mains, absorption d'eau, exercices respiratoires (pranayama), yargom... Il y a dès lors purification par l'eau, l'air puis le feu.
   Parallèlement, on va semer neuf graines (lentilles, blé, riz) dans neuf récipients - le symbolisme du neuf correspondant à une spiritualité accomplie - pour symboliser la purification par l'élément terre. On va arroser ces graines durant les dix jours de cérémonie. La germination de ces graines symbolisera la présence divine.
   La montée du "nargoulam" - drapeau - en haut du "codi" - mât - du temple insistera sur la nécessité de profiter de cette vie pour s'élever constamment. Elle signera le début du carême pour chaque pénitent : prières, végétalisme et abstinence sexuelle.
   Au pied du pavillon, après voir prié Surya - le dieu Soleil - et Ganesh - le dieu de l'intelligence, celui qui ôte les obstacles de notre vie - on aura fixé au mât un bouquet de fleurs, un "kap", avec une jeune canne à sucre et une gerbe de vétiver.
   Puis ce sera le moment de l'engagement individuel : "l'amar-kap" : le prêtre attache lors d'une petite cérémonie un cordon safrané composé de trois fils (la trinité hindoue) autour du poignet du fidèle.
   Le rituel se poursuivra avec "l'abishegam" : devant l'assemblée des fidèles, le prêtre fera la "toilette" des divinités avec cinq produits sacrés : du miel, du lait, de la banane, du ghee (beurre clarifié) et du citron, avant de procéder au "yargom" : devant les koumbons - vases en cuivre surmontés d'un coco - représentant les divinités vénérées dans le temple, le prêtre fera un petit feu dans lequel il offrira à celles-ci un mélange de neuf graines et de pétales de fleurs en récitant 1008 mantras.
   Après un repas végétarien partagé entre les fidèles, leurs familles et les pauvres, et une "puja" - prière collective - a lieu quotidiennement durant ces dix jours une procession en ville avec la présence dans le char des divinités de Mourouga et de ses duex épouses - Valli et Devanesa - représentant le désir et l'activité, qualités indispensables à la réussite de notre vie matérielle.
   Durant cette procession en ville, seront bénies les maisons et familles en ayant fait la demande au temple. Le prêtre-  devant le barreau où ont été répandues des fleurs d'œillet d'inde, cassera symboliquement un coco pour montrer qu'il faut nous attacher tout au long de notre vie à casser notre égo pour atteindre le divin et se fondre en lui.
   La veille du dixième jour, on fabrique le "cavadee" : arche fleurie que porteront les fidèles en procession le dixième jour, de la rivière purificatrice au temple où ils entreront à genoux pour déposer leur arche au pied du divin.

   Le dixième jour, après "l'abishegam" et le "yargom", ils rejoindront la rivière - ou la mer -, ils se purifieront alors par un bain purificateur, revêtiront des vêtements neufs, feront bénir leur cavadee, offriront un plateau d'offrandes aux divinités du char, et parfois se feront piquer des aiguilles d'argent sur le corps, voire la langue, en signe de mortification.
   Tout au long du parcours, ils seront accompagnés de prêtres récitant des textes sacrés et de leur famille entonnant des chants sacrés et des mantras.
   Après cette procession, sous un soleil de plomb, sur un macadam brûlant, avec quelques arrêts pour bénir maisons et familles sur le trajet, les fidèles déposeront leur cavadee au pied du dieu après être entrés dans le temple à genoux.
   On présentera ensuite les lampes à Mourouga pour recevoir la bénédiction divine et on partagera le lait et le nectar de fruits et de miel contenus dans les "sambous"- vases en cuivre - placés de chaque coté du cavadee.
   La cérémonie se terminera par la descente du drapeau - signant ainsi la fin du carême -. On ôtera aussi le "kap" du poignet du pénitent lui ôtant tout engagement cérémoniel.

© Patrice Louaisel, 2012 - Site : http://www.indeenfrance.com/reunion.php

 

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