Kathleen Scarboro :

"Je continue à poursuivre le rêve de l'oeuvre idéale, sur laquelle je travaille tous les jours"

      
  

   Son exposition Compositions indiennes, à Paris, en décembre 2009, a montré au public de la capitale française à quel point l'artiste américaine Kathleen Scarboro a su puiser son inspiration dans une culture qui lui est pourtant étrangère. Le "réalisme magique" de ses toiles ne peu laisser indifférent, et K. Scarboro pratique également la sculpture et l'art de la mosaïque.


Interview  -  Galerie  -  Site Internet


Interview

  • IR : Kathleen Scarboro, pouvez-vous commencer par vous présenter à nos visiteurs ?

    KS : Je suis artiste peintre, sculpteur, mosaïste et muraliste, née à Chicago en 1950. Dans mes peintures d'atelier, je me suis beaucoup intéressée à l'Inde et la Réunion.
     

  • IR : Votre créativité dans le domaine des arts plastiques embrasse donc des formes et des supports variés : pouvez-vous nous en dire davantage ?

    KS : J'ai vécu de commandes d'art public, ou d'art pour les collectivités (théâtre, télévision). Ce sont les commandes qui m'ont fait explorer des techniques diverses, en réponse à une demande qui évoluait. Ce sont par exemple, les clients qui m'ont demandé de devenir sculpteur.  
     

  • IR : Comment vous êtes-vous formée à ces diverses techniques et formes d'expression ?

    KS : J'ai fait deux écoles supérieures d'art : L'Université du sud d'Illinois (SIU) aux États-Unis, puis l'École des Beaux Arts de Paris. Après, j'ai travaillé en équipe et je me suis formée "sur le tas".
     

  • IR : Vous reconnaissez-vous des modèles ? Quels sont les artistes que vous admirez le plus ?

    KS : J'ai eu une chance inouïe : j'ai rencontré mon maître de peinture à vingt ans, dans mon université aux États-Unis. C'était un peintre et professeur extraordinaire qui s'appelait Patrick Betaudier, d'origine Trinidadienne. Il est décédé  l'année dernière et je me vois comme une des personnes qui continuent ses idées et sa technique.
       Sinon, j'aime énormément la peinture de la Renaissance et de la période baroque (le Titien, Bellini, le Caravage ). Parmi les mouvements plus modernes, j'apprécie les nabis (Bonnard, Vuillard,) les impressionnistes, et Gustav Klimt.

  • IR : Personnages, mouvements et couleurs vives semblent être à la base de vos tableaux, leur donnant dynamisme et vie : est-ce effectivement ce que vous cherchez à exprimer, créer ou recréer ?

    KS : Sans vouloir parler de façon obscure, je cours après un but qui s'éloigne. Le message, en peinture, vient souvent avant la compréhension, même pour l'artiste lui- même. Je favorise une dynamique qui s'exprime à travers moi, puis, comme le spectateur, j'intellectualise. Parfois le spectateur analyse mieux que moi le sens de l'oeuvre. En tout cas, je peux dire que je peins la vie. Les gens, la simple beauté du quotidien, les liens entre tout ce qui participe au vivant. Le mystère au fond de notre existence.

  • IR : Vous qualifiez vous-même votre orientation artistique comme celle du "réalisme magique" : que faut-il comprendre à travers cette expression ? Que la magie, pour vous, fait bel et bien partie du réel ? Et dans quel sens faut-il prendre la notion de magie ?

    KS : La vie est magie, mais nous l'oublions souvent. Elle nous paraît répétitive, ordinaire, alors que c'est très étonnant, ce monde complexe. Je ne veux pas oublier le mystère au centre de chaque être vivant. J'aimerais redécouvrir la vie chaque matin. C'est ce que font les petits enfants, et c'est pourquoi ils sont si attirants. L'idéal serait de combiner la fraîcheur de l'enfant avec le pouvoir d'action de l'adulte.

  • IR : Pouvez-vous nous expliquer en quoi vos lieux d'inspiration que sont l'Inde et la Réunion correspondent justement à cette esthétique - et peut-être aussi cette "philosophie" - du réalisme magique ?

    KS : Souvent, on peut avoir un regard plus frais sur un univers nouveau que sur celui dont on est issu. J'aime explorer les différentes conceptions et fonctionnements intérieurs des êtres humains. Essayer de comprendre comment ils se sentent, se voient. Les Réunionnais et les Indiens me paraissent plus proches de leurs sentiments, plus spontanés, peut-être moins programmés que les Européens et Américains des États-unis. J'aime leur façon d'intégrer la couleur, le son, la danse dans leur quotidien.
       Le réalisme magique est un terme qui me plaît par sa contradiction. Une définition : l’appellation
    réalisme magique est utilisée depuis 1925 dans la critique littéraire et la critique d’art pour rendre compte de productions dans lesquelles des éléments perçus ou décrétés comme « magiques » surgissent dans un environnement par ailleurs réaliste.
       Le terme  décrit à la fois un mouvement en peinture et en littérature. Il a souvent été utilisé pour décrire certains peintres surréalistes (de Chirico, Carra, Miro).
       Je l'emploie à ma façon. Dans mes peintures, c'est plutôt la relation entre les éléments qui se traversent les uns et les autres en transparence, qui crée un univers inhabituel. Le réalisme magique résulte de la composition. A vrai dire, l'être humain est par sa nature une créature réaliste magique et je décris son univers intérieur et extérieur. Ou comment son monde intérieur donne naissance à son monde extérieur.

  • IR : Comment, sur le plan technique, travaillez-vous en tant que peintre : d'après photographie, sur le terrain... ?

    KS : Le terrain d'abord. Le rencontre avec les gens, leur monde. D'abord le terrain, parce qu'il faut vivre quelque chose pour le peindre.
       Le document photographique est une invention formidable. Elle est imprimée avec des fragments de vie.
       Je compose avec ces fragments et des éléments purement picturaux (coups de pinceaux, divisions de surfaces, toute la panoplie du peintre).
       J'emploie une technique qui date de la Renaissance flamande (XVème - XVIIème siècles). Création d'abord du tableau en grisaille avec blanc d'argent et terre d'ombre ou d'autres pigments, suivi de glacis à l'huile. Grand travail des blancs pour créer des gris optiques qui donnent la luminosité au glacis.
       Un tableau de taille moyenne prend deux ou trois mois d'exécution.

  • IR : Dans certaines toiles telles que Homme endormi ou votre Fillette aux melons, vous avez recours à des motifs graphiques décoratifs d'inspiration traditionnelle : simple recherche esthétique, ou bien faut-il y voir autre chose ?

    KS : Les motifs aident à définir l'univers en question. L'Inde, les indiens, s'expriment de façon créative en dessinant sur tous les supports imaginables (camions, textiles, chameaux, sols, murs, peau...) C'est pourquoi ils sont aussi dans mes tableaux.

  • IR : Vos sculptures, vos mosaïques... obéissent-elles aux mêmes orientations esthétiques et se nourrissent-elles des mêmes inspirations que vos peintures ?

    KS : Mes oeuvres d'art public répondent à une demande précise, qui détermine beaucoup d'aspects de mon approche du sujet. L'enjeu, c'est de trouver le pont entre moi-même, artiste, et le demandeur qui est généralement un groupe de personnes qui soutient certaines idées. J'estime que l'oeuvre est un succès quand nous sommes tous les deux satisfaits. Je suis contente de ce travail avec le public parce que je découvre beaucoup de nouvelles idées et techniques. C'est enrichissant d'avoir l'opportunité de faire des choses que je n'aurais pas faites autrement.
       En sculpture, le travail avec le modèle vivant est incontournable. Regarder un corps et le rendre en sculpture est extrêmement difficile, mais si fascinant.

  • IR : Quelle est l'oeuvre artistique idéale que vous rêveriez de réaliser ?

    KS : Je continue à poursuivre le rêve de l'oeuvre idéale, sur laquelle je travaille tous les jours. Idéalement, je prendrais le temps pour travailler un grand tableau (2m x 1,5m) qui est actuellement dans mon atelier. Comme j'ai sans arrêt de nouvelles envies, j'ai du mal à trouver les deux ans qu'il me faudrait pour réaliser ce tableau.

  • IR : De manière peut-être plus terre-à-terre, quels sont vos projets en tant qu'artiste ?

    KS : J'irai aux États-Unis en janvier 2010 pour faire de la sculpture et donner un cours de peinture à l'huile. Je peindrai toujours, car c'est ma façon de participer à l'évolution du monde et je m'ennuie quand je m'arrête...

  

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Galerie / Gallery

         

    

 
               
 

 

      
               

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Site Internet

  

   Ce qui plaira avant tout au visiteur du site de Kathleen Scarboro, c'est bien sûr l'ensemble iconographique qui reprend peintures, sculptures et mosaïques de l'artiste. Outre ces diverses galeries, dont une est spécifiquement consacrée aux "peintures indiennes" et une autre aux "peintures réunionnaises", on trouvera notamment un CV de K Scarboro et une rubrique "reproductions" à partir de laquelle on peut passer commande desdites reproductions, dons nous découvrons la description technique.
   Le site est en versions anglaise et française ; il se trouve à cette adresse : www.kathleenscarboro.fr

     

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