Ollivier Leroy :

"prendre le meilleur de Bollywood et essayer de gommer les préjugés pour faire découvrir la richesse culturelle et musicale de ce pays"

      
  

   Créateur et leader d'Olli and The Bollywood Orchestra, le musicien rennais Ollivier Leroy répond à nos questions sur son parcours, sur le dernier album Olli Goes To Bollywood et le spectacle du même titre.urs.
   En partenariat avec
La Nouvelle Revue de l'Inde.


Interview  -  Le CD


Interview

  • LNRI/IR : Olli, pourriez-vous d'abord vous présenter à nos lecteurs et présenter votre groupe ?

OL : Je suis pianiste, compositeur de formation, mon vrai nom est Ollivier Leroy et j’habite à Rennes depuis plus de vingt ans. Je me suis orienté dés l’âge de dix-sept ans vers le travail de la voix et je me suis produit très rapidement sur scène en tant que chanteur dans différents ensembles musicaux.

   Mes expériences musicales sont diverses et variées. Depuis 1994, je me suis produit avec Pandip, une formation «world music» (pour l'album Parfums chez Keltia Musique et deux mini L.P), avec Shafali, une formation composée de musiciens traditionnels bretons. J’ai participé à de nombreuses créations (René Madec, le Nabab, un conte musical avec entre autres le chanteur Yann-Fanch Kemener, Shafali et le quatuor à cordes Mishra...). J’ai enregistré avec le groupe de world-jazz Mukta (Warner music), avec le percussionniste breton Dominique Molard pour Stock an dans (Keltia musique), avec le groupe de chanson française La Tordue (Sony music) pour son single "Pétrin" contre la double peine.

   J’ai  également six créations de ciné concerts à nom actif depuis 2001 en étroite collaboration avec des festivals, des distributeurs de films, des villes.

   Enfin en 2006 , j’ai été  lauréat de la bourse Villa Médicis hors les murs, décernée par Culturesfrance (actuellement Institut Français, opérateur du ministère des affaires étrangères).

   En 2002, je suis tombé sous le charme de l’univers Bollywood, j’ai décidé après plusieurs tâtonnements de créer un spectacle en 2004, Olli and the Bollywood Orchestra. Ce projet , c’est le fruit et le hasard d’une rencontre avec des musiciens et instrumentistes indiens de Calcutta.
   Toute l’année, ces derniers enregistrent des musiques pour les fameux films de Bollywood, contraction de Bombay et Hollywood désignant l’industrie cinématographique d’un pays où la réussite d’un film repose avant tout sur le succès de ses chansons et de ses chorégraphies.
   Ce premier spectacle musical et vidéo est créé durant l’été 2004 grâce au soutien commun des festivals bretons
Les Vieilles Charrues et Les Tombées de la nuit.
   En 2005, une version remix  est créé lors du festival des Transmusicales de Rennes avec la nouvelle scène indo-pakistanaise londonienne.
   Suivront de nombreuses tournées en Europe et en Afrique dans de prestigieux festivals et salles. Deux albums seront distribués à travers l’Europe (Kitch’en en 2005 et Tantra en 2008), enregistrés en partie en Inde et peaufinés aux  studios Real World (UK) de Peter Gabriel par Marco Migliari (Afro Celt sound System, Ananda Shankar, Massive Attack…).
Le projet a  été soutenu par de nombreux organismes.

  • LNRI/IR : Quels ont été vos premiers contacts avec la musique indienne et qu'est-ce qui vous a initialement attaché à elle ? Vos racines bretonnes vous ont-elles donné une quelconque prédisposition à ces contacts ?

OL : J’ai découvert la musique Indienne vers 1987 grâce à Bob Coke, un musicien américain de renommée internationale. J’ai démarré un travail de voix autour des échelles Indiennes auprès de lui. Puis j’ai travaillé à Paris avec Gilles Petit,  où j’ai appréhendé simultanément le chant lyrique, le chant du raga indien, le théâtre musical.

   J’ai entrepris en 1992 un premier voyage en Inde. Là-bas, je me suis perfectionné dans le chant classique de l’Inde du Nord (genre Dhrupad) en suivant l’enseignement d’Ustad Fahiddudin Dagar à Bombay.

   A Paris, j'ai travaillé avec une chanteuse indienne de Calcutta ; j’ai appris l’aspect plus populaire de la musique indienne à travers des bhajans (chants dévotionnels) en hindi, bengali, penjâbi.

   Dans la continuité d’une licence de musicologie orientée vers la musique classique occidentale, j’ai présenté à l’Université de Rennes 2, un mémoire sur le thème de "L’influence de la musique indienne chez les compositeurs français après 1945".

   Enfin, j’ai abordé aussi  le chant qawwali, style populaire du Pakistan auprès de Shuaïb Mustaq.

   La musique indienne a été comme un aimant musical pour moi, un focus permanent qui m’a nourri dans ma réflexion artistique et mon rapport à la musique. C’est avant tout une passion qui petit à petit s’est invitée dans mon processus compositionnel.

   Ce qui m’a séduit de suite dans la musique indienne, ce sont les sons étirés, l’usage de la voix comme instrument, toutes choses qui se retrouvent à travers les ragas, les chants bhajans dévotionnels, les cordes indiennes et l’extrême complexité des rythmes de la musique indienne. J’ai alors commencé à chercher des hybridations qui reflètent ma culture occidentale et cette culture d’adoption.

   Je pense que la Bretagne a été pour moi, une région propice à mon parcours. D’abord il y a l’intérêt des musiciens traditionnels bretons pour cette musique (les modes indiens, les instruments…), un public curieux, les possibilités de fusionner mon travail autour de cette musique avec d’excellents instrumentistes. L’implantation de nombreux festivals (Les Tombées de la Nuit, les Vieilles Charrues, Les Transmusicales…) et d’un milieu professionnel curieux de nouveautés a été essentiel pour me faire connaître.

  • LNRI/IR : Y a-t-il des musiciens indiens qui vous semblent avoir eu une influence particulière sur votre œuvre musicale ?

OL : Bien sûr. Au début, un artiste comme Nusrat Fath Ali Khan a été pour moi une révélation ; sa façon de chanter, d’improviser a été pour moi un exemple à suivre. Puis, j’ai découvert d’autres grands artistes indiens (L. Subramaniam, Shankar le violoniste, Ali Akbar Khan, Parveen Sultana, Jasraj…)
   Avec le début du projet Olli and The Bollywood Orchestra, je me suis tourné vers des chanteurs comme Rahat Fateh Ali Khan, Udit Narayan, Shankar Mahadevan où des chanteuses comme Shreya Ghosal.
   J’ai aussi beaucoup écouté la scène Asian anglaise des années 90, le label londonien Nation Records, Fundamental, Sun Of Arqua, Barmarsh and Shri avec lequel nous avons collaboré pour un remix en 2008, Talvin Singh, bien sûr, Nitin Sawhney, …La chanteuse Sheila Shandra… les projets indiens de Real World… J’ai toujours été curieux et à l’écoute de projets qui fusionnaient musique / sons Indiens et électro.

  • LNRI/IR : Comment définiriez-vous ou décririez-vous le type de musique que vous pratiquez ?

OL : J’essaie de réinterpréter de façon personnelle la musique de Bollywood. Mes marges de manœuvre ne sont pas évidentes. Il faut éviter les pièges du mimétisme exotique. Les chansons pour ce dernier album sont originales, construites comme des tubes bollywoodiens revisités à la sauce occidentale, mâtinées de rythmes et sons électroniques. Sur les précédents albums,  certains « tubes » de Bollywood avaient été revisités de façon moderne. La basse, les guitares électriques, les claviers se mariant aux tablas, mridigam, santur, sitar, et autre sarangi de la musique traditionnelle indienne. Il s’agit avant tout pour moi de rendre accessibles aux oreilles occidentales, une musique et une culture complexes et lointaines.
   Si, on veut résumer, on pourrait dire qu’il s’agit de World music où de Fusion, mais je n’aime pas tellement ces termes car ils sont très réducteurs et péjoratifs.

  • LNRI/IR : Il ne s'agit donc pas exactement d'une musique "exotique" et festive ?

OL : Non, plutôt , d’une musique festive et moderne, le but étant de donner à l’auditeur occidental une vision plus actuelle de cette musique, de prendre le meilleur de Bollywood et d’essayer de gommer les préjugés pour faire découvrir la richesse culturelle et musicale de ce pays.

  • LNRI/IR : Certains morceaux ("Pyar Ho Joua" sur le dernier album, "Sapena" sur l'album Kitch'en...) semblent plus "graves", "émotionnels" et "profonds"... Que pouvez-vous en dire ?

OL : "Pyar Ho Joua" est une chanson d’amour ("Je t’aime" en hindi) , "Sapena" aussi ("Rêve" en hindi), ces deux titres parlent de l’amour impossible, thème récurrent dans la musique de Bollywood, ce sont des chansons plus émotionnelles bien sûr parce que la façon de chanter doit être très intériorisée et onirique.

  • LNRI/IR : Comment avez-vous affronté l'obstacle de la langue, si tant est qu'il faille parler d'obstacle ?

OL : J’ai commencé à chanter de façon phonétique. Au début, les Indiens eux-mêmes trouvaient que je prononçais bien et me comprenaient, je me suis dis que j’avais sans doute quelque chose à creuser en chantant dans cette langue. En 1997, j’ai rencontré Aparna Narayan, une Indienne du Bengale, artiste peintre et poétesse, je me suis alors plongé dans l’apprentissage de l’écriture du sanskrit et de la langue hindi. Celle-ci m’a ensuite écrit plusieurs textes originaux que j’ai mis en musique pour nom répertoire et le projet Olli and The Bollywood Orchestra.
   Mon idée est d’être plus précis pour pouvoir chanter en hindi et d’être plus crédible auprès des Indiens, mais je ne parle pas vraiment hindi.

  • LNRI/IR : Quel regard portez-vous sur le cinéma indien, qui semble largement vous inspirer ?

OL : Pour moi, le cinéma indien est le reflet du peuple indien : on y  trouve toutes les facettes de la société indienne, c’est pour cela que le cinéma est si important en Inde.
   C’est un art très populaire qui véhicule tout, la musique, la mode… l’esthétique visuelle, dénonce les inégalités sociales, et est accessible à tout le monde.
  Je trouve que c’est un cinéma très mal connu en France et dont la plupart des gens ont une idée fausse et stéréotypée. On parle toujours d’un cinéma kitch,  à défaut de le connaître réellement dans sa globalité.

  • LNRI/IR : Comment vos créations sont-elles perçues par le public français ?... Et en Inde ? Y êtes-vous connus et reconnus ? Quelles rencontres marquantes y avez-vous faites ?

OL : Souvent, les gens nous disent, après le spectacle, que si l’Inde est comme cela, ils n’hésiteront pas à y aller, donc le pari est gagné. En France, L’Inde fascine, les clichés sont très forts, mais nous essayons de donner une image plus moderne de ce pays, plus accessible, moins exotique.
   J’ai fait en Inde de nombreuses rencontres professionnelles à Kolkatta, Chennai, Mumbai, qui me permettent aujourd’hui de pouvoir monter mes projets facilement.
   Olli and The Bollywood Orchestra n’a pas encore tourné là-bas, cela devrait se faire l’année prochaine avec ce dernier spectacle qui me paraît plus abouti.
   Les Indiens, en particulier Asad Khan, le sitariste qui joue avec A.R Rahman sur Slumdog millionaire, me dit que je dois venir à Bombay car, pour lui, mon projet correspond à ce qu’attendent aujourd’hui les Indiens.

  • LNRI/IR : Pouvez-vous nous parler plus précisément de votre dernier album, et notamment de cette étonnante reprise du tube de Frankie Goes to Hollywood, "Relax", que l'on doit bien sûr rapprocher du titre de ce dernier opus ?

OL : Il s’agissait avant tout de faire un clin d’œil au titre du spectacle bien sûr. Nous avions sur le précédent album Tantra réalisé un remix Bollywood du titre "A forest" de The Cure, l’idée étant d’accrocher l’oreille de l’auditeur occidental sur des reprises que les gens connaissent bien, mais aussi pour se faire plaisir.

  • LNRI/IR : Que pensez-vous d'artistes tels que Pascal Héni, qui évolue dans un univers musical comparable au vôtre, ou Rashmi Kant, dans un registre un peu différent ?

OL : Si Pascal Héni évolue dans la même "niche" (Bollywood) que nous, la comparaison s’arrête là, à mon sens, en particulier sur ce dernier spectacle. Nous avons créé et conçu la musique et la vidéo pour en faire une vision très personnelle de Bollywood. De mémoire, Pascal Héni a simplement réinterprété des standards de Bollywood. Son parcours musical et artistique n’est pas basé sur l’apprentissage de la langue et de la musique indienne, je crois qu’il a juste eu une passion pour l’univers de Bollywood.
   Par contre, je ne connaissais pas Rashmi Kant, vous venez de me le faire découvrir.

  • LNRI/IR : Quels sont vos projets (scène, enregistrements...) ?

OL : Pour le moment, il s’agit pour moi de faire connaître le troisième volet auprès d’un public le plus large. Nous serons de retour en octobre, puis en 2014 sur le printemps où l’été et nous travaillons sur le montage d’une tournée en Inde en 2014 dans les Alliances Françaises.

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Le CD
 

   Un album et un spectacle épicés, "made in India" avec les plus grands musiciens de Bollywood (lien).

Avec son troisième album décliné en un ciné-concert original, le chanteur et compositeur Olli importe en France toutes les sensations fortes d’un Bollywood coloré
Un album comme au cinéma...
C’est l’histoire d’un chanteur breton tombé amoureux d’une star du cinéma de Bollywood, qui parcourt l’Inde à sa recherche. La dizaine de titres de l’album Olli goes to Bollywood racontent et ponctuent cette quête. Les thèmes, les rythmes : tout y est pour faire vivre aux auditeurs les émotions fortes d’un film de « Bollywood ».
L’inimitable son indien, Olli est allé le chercher là-bas. L’album a été enregistré à Chennai (Madras), dans les studios et avec les musiciens d’A.R Rahman, le célèbre compositeur de la musique de Slumdog millionnaire. Une collaboration qui a permis à Olli de bénéficier d’un grand orchestre à cordes réputé, des meilleurs instrumentistes et de la chanteuse Kavita Baliga. Tous dédient le reste de leur temps à enregistrer pour les fameux films de Bollywood.

Un spectacle pour découvrir l’Inde
Sur scène, Olli est entouré des musiciens indiens et français. Derrière lui : un grand écran où il sert l’Inde sur un plateau à qui veut la goûter. En janvier 2013, une équipe menée par le vidéaste Jesse Lucas est partie dans le Sud de l’Inde filmer les aventures du chanteur amoureux. Les scènes et clips de ce Bollywood inimitable ont été tournés en collaboration avec une production indienne, une chorégraphe, une troupe de danseuses, danseurs, acteurs et figurants de Madras. Derrière le kitsch, les couleurs et l’enthousiasme de cette folle histoire rejouée sur scène, on trouve de précieuses clés pour comprendre le peuple indien. On n’a jamais voyagé en Inde aussi facilement.

Olli goes to Bollywood est le troisième volet de l’aventure qu’est "Olli & the Bollywood Orchestra". Deux albums ont été distribués à travers toute l’Europe : Kitch’en en 2005 et Tantra en 2008.

Coproducteurs : Bleu Pluriel à Trégueux, La Vapeur à Dijon, Les Tombées de la Nuit à Rennes.
Partenaires institutionnels : La Région Bretagne, la Convention Institut Français / Région Bretagne, la Convention Institut Français / Ville de Rennes et Rennes Métropole, le Centre National de la chanson, des variétés et du jazz, l’Adami, la Sacem.

En tournée été et automne 2013, disponible 2014
Album sorti en France, Allemagne, Benelux

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