On constate depuis des années maintenant que la plupart des pays du monde, en Occident aussi bien qu'en Orient, ont vu leurs pratiques médicales se diversifier.  En Inde comme à la Réunion, en Europe comme aux Amériques, les technologies de pointe et les plus récentes innovations de la médecine allopathique côtoient des traditions ancestrales, souvent fondées sur l'observation et la compréhension de la nature.

 

   C'est le cas de la médecine ayurvédique indienne, une des six formes de la médecine traditionnelle du sous-continent, et certainement la plus fameuse. Ayurvéda est maintenant un mot connu de tous, ou presque, aussi en Occident, tandis que sa pérennité en Inde même semble témoigner de ses vertus et de son efficacité. Des praticiens sont implantés un peu partout ans le monde, et maints occidentaux ont été formés sur les bases de la tradition indienne, ainsi que le confirment les deux interviews que vous pourrez lire dans ces quelques pages. Il nous a en effet paru intéressant de laisser la parole à de vrai(e)s professionnel(les)s pour compléter les informations de base de ce dossier...

         

Origines et principes      -      Petit lexique de l'Ayurvéda

  Interview de Cécile Blau   -   Interview de Nelly Jorez   -   L'Ayurvéda sur la Toile


Origines et principes

   L'Ayurvéda, comme toute tradition ancestrale, trouve ses origines dans des époques lointaines et difficiles à déterminer. Il est évident que les principes et les pratiques ayurvédiques se sont élaborés progressivement au cours des siècles, par accumulation de savoir et d'expérience. Les origines premières de l'Ayurvéda sont millénaires : des préparations médicinales sont ainsi mentionnées dès l'âge des Veda (probablement débutés autour du XIIe - Xe s. avant JC, tandis que d'autres les font remonter à des périodes bien antérieures) ; mais l'Ayurvéda lui-même serait vieux de 5 000, voire 10 000 ans ! Le Charaka Samhitâ, rédigé par un célèbre médecin du nom de Charaka, daterait du Ier ou IIe siècle de notre ère selon les uns, ou du XVe s. avant JC selon les autres ! Et l'on pourrait multiplier les exemples de ce flou historique qui règne dans le domaine que nous abordons. Ce qui semble sûr, c'est que les périodes plus tardives - le Moyen Age indien, avec son lot d'invasions et les atteintes portées à la civilisation hindoue - ont connu une sorte de déclin de l'Ayurvéda, qui ne s'est semble-t-il maintenu que comme pratique populaire et quelque peu cachée. Mais l'important est qu'il a réussi à traverser les siècles, transmis de maître à disciple.
   S'il faut localiser géographiquement le berceau de l'Ayurvéda, nous ne somme guère mieux lotis : les origines aryennes nous renvoient à l'Asie Centrale, à l'Iran, au nord de l'Inde, mais des influences dravidiennes sont probablement venues s'ajouter au fil du temps... à moins qu'elles aient été elles-mêmes fondatrices. On a retrouvé des traces de produits ayurvédiques datant de la civilisation de la vallée de l'Indus, à Harappa notamment. Ce qui est sûr, c'est qu'un lien profond existe avec la religion hindoue, ce qui justifie la forte présence de l'Ayurvéda actuellement en Inde, au Sri Lanka et au Népal.
   Alors qu'en Occident l'Ayurvéda reste étiqueté comme simple médecine alternative, son statut actuel en Inde est tout à fait officiel et reconnu par le CCIM (Conseil Central de la Médecine Indienne). Des organismes officiels de recherche œuvrent pour sa reconnaissance et son évolution.

   Pour ce qui est des principes fondamentaux de l'Ayurvéda, il est intéressant de s'attarder tout d'abord sur l'étymologie du mot : âyus signifie "vie", "longévité", tandis que veda fait référence au savoir. L'Ayurvéda est donc essentiellement la science de la vie, de la longévité. On est proche étymologiquement de la notion de "biologie" (science de la vie selon les racines grecques). En réalité, cette science s'inscrit profondément dans une connaissance du monde, dans ses formes naturelles, matérielles et spirituelles, et dans la conscience que l'homme fait partie intégrante de ce monde. Ainsi, la santé et la qualité de vie dépendent des interactions entre l'individu et son environnement, son alimentation, ses activités... Les prescriptions thérapeutiques, à base d'éléments naturels - en particulier végétaux et minéraux - s'inscrivent dans une démarche d'ensemble qui peut inclure aussi massages, pratiques yoguiques et modifications du mode de vie. La santé dépend avant tout d'un principe d'équilibre et d'harmonie, avec soi-même et avec le monde.
   L'homme, qui s'inscrit dans l'univers, ou même qui en constitue une sorte de résumé microcosmique, est fait d'éléments premiers, au nombre de cinq, qui se combinent en trois dosha(s), comparables en quelque sorte "humeurs" de la médecine antique européenne. L'élément éther (ou espace) associé à l'élément air forme Vata dosha, qui régit notamment les rythmes biologiques et métaboliques, la respiration, etc. Le feu forme Pitta dosha, l'énergie physique, et détermine également ce qui touche au fonctionnement alimentaire (ingestion, digestion). Enfin l'association des éléments eau et terre forme Kâpha dosha, force qui assure l'unité cohérente du corps. Ces trois doshas se traduisent aussi sur le plan psychologique : Vata s'exprime aussi bien par la gaieté que par la peur ou la nervosité, Pitta par la colère, l'agressivité, Kâpha par l'amour, la bravoure, le calme, mais aussi la générosité ou... l'avarice...
   Un individu est "en bonne santé" si les trois dosha(s) se trouvent en équilibre harmonieux. Inversement, dès qu'il y a carence ou excès de l'un des trois, cet équilibre est rompu et l'individu est dès lors en situation de pathologie plus ou moins grave. Le praticien découvrira ce déséquilibre et sa nature par un diagnostic fondé sur une observation minutieuse de l'état physique apparent du patient, sur une exploration de son vécu, de données environnementales, comportementales... Les paramètres pris en compte sont nombreux dans cette observation : par exemple la prise du pouls, extrêmement élaborée. A partir de ce diagnostic, la prescription sera faite en fonction de tous les symptômes mais aussi des autres paramètres observés : il ne s'agit pas de s'attaquer frontalement à la pathologie, mais de permettre au malade, en tant qu'individu, de retrouver l'équilibre rompu, ce qui inclut un ensemble complet de remédiations d'ordres divers, par exemple : régime alimentaire, yoga, séances de méditation, phytothérapie, massages, etc. Deux malades souffrant d'une même pathologie pourront donc recevoir deux "traitements" différents, prenant en compte des caractéristiques individuelles qui seraient négligées par la médecine allopathique occidentale.

   Il ne faut bien évidemment pas prétendre que l'Ayurvéda est la voie parfaite et absolue vers la solution universelle aux problèmes de santé. Il s'agit seulement de se rendre compte que cette approche, qui passe parfois pour une "médecine du pauvre", a certainement - comme d'autres pratiques traditionnelles dans le monde - beaucoup à enseigner à l'humanité et à chacun de nous.

 

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