EX-PETITION
Contre la discrimination
religieuse en
AFGHANISTAN

 
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    Les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis et la campagne militaire en Afghanistan sont des événements marquants et dérangeants qui ne peuvent laisser indifférent. Pour ma part, je n'ai pas souhaité réagir à chaud sur ce site mais, autant que faire se pouvait, j'ai tenté de prendre un certain recul qui m'a paru nécessaire.
   Au terme d'une difficile réflexion, j'ai pris la décision de retirer la pétition que j'ai lancée il y a plusieurs mois. Non qu'elle soit devenue totalement dérisoire face à l'ampleur des événements (il reste inadmissible d'imposer le port d'un signe distinctif à des individus sous prétexte d'appartenance à telle communauté religieuse), mais parce que, pratiquement, elle n'avait plus de chance d'aboutir.
   Je tiens toutefois à exprimer quelques remarques sur la situation actuelle, qui a semé le doute dans bien des esprits, et suscité bien des prises de position discutables. Je ne prétends en rien donner des leçons à quiconque, je suis seulement attristé de constater combien, face à des circonstances exceptionnelles, les opinions deviennent souvent radicales, caricaturales et aveugles. On se contente de choisir son camp, dans une logique manichéenne qui fait des uns ou des autres des représentants du Mal, à abattre coûte que coûte.
   En l'occurrence, il me semble que l'essentiel est de se poser les bonnes questions : qu'est-ce que le mal ? Qui a fait le mal ? Peut-on et doit-on punir ceux qui ont fait le mal ?

   Qu'est-ce que le mal ? Oter la vie d'une personne, provoquer la souffrance : voilà, je crois, à quoi se résume l'essentiel du mal. Sachant que la pauvreté est souffrance, la maladie est souffrance, la privation de liberté est souffrance, l'humiliation est souffrance, la peur est souffrance...

   Qui a fait le mal ? C'est ici que toute vision simpliste et manichéenne devient absurde. Qui a ôté des vies ? Qui a provoqué la souffrance ? Faut-il oublier - pour les uns - que les Talibans ont fait souffrir et font souffrir, ont tué et tuent le peuple afghan, les femmes afghanes... ? Faut-il oublier que Ben Laden, s'il s'agit bien de lui, est responsable de milliers de morts ? Faut-il oublier  - pour les autres - que les Américains, que les Occidentaux, par la violence économique érigée en système mondial, ont fait souffrir et font souffrir, ont tué et tuent des millions de personnes ? La responsabilité du mal incombe aux uns ET aux autres. Se résoudra-t-on  à vouloir quantifier le mal donné et le mal reçu ? Cela a-t-il un sens ? Cela est-il possible ? Cela aboutirait-il à une quelconque justice soupesant impartialement le poids des fautes ? Je ne saurais l'imaginer.

   Peut-on et doit-on punir ceux qui ont fait le mal ? Eviter de faire souffrir est un bien, empêcher l'action de ceux qui font souffrir est donc un bien. L'éternelle question est de savoir si j'ai le droit à mon tour de faire souffrir ceux qui font souffrir. Ben Laden a-t-il le droit de punir des Américains parce que la puissance économique de l'Amérique est responsable ou complice du mal ? Bush a-t-il le droit de faire souffrir les Afghans parce que le le régime des Talibans et ses protégés sont responsables ou complices du mal ? Existe-t-il un point jusqu'auquel il est acceptable de faire souffrir et au-delà duquel ce n'est plus tolérable, un point qui définisse l'existence de ce "droit" ? Je ne saurais non plus le dire. Mais je sais que s'arroger ce droit sans nuance, c'est ouvrir la porte à l'horreur.

   Le monde est multiple, le monde est multiplicité. Tend-t-il vers l'un, vers l'unicité ? C'est ce qu'on pourrait croire et même que l'on pourrait croire bon si unicité veut dire harmonie et fin du mal. Utopie !
   Encore faudrait-il tendre vers l'Un sur la base de valeurs transcendant par le haut la multiplicité. Or, que vois-je autour de moi ? Pour tendre vers l'Un, les hommes n'ont rien trouvé de mieux que de se regrouper... sur la base de valeurs puisées dans la multiplicité même, et réduites au plus simpliste, au plus insignifiant dénominateur commun. Généralement, plus un groupe humain est large, plus le fil qui en unit tous les membres est ténu. Patrie, Liberté, Dieu, l'Ennemi commun... Ici de simples mots derrière lesquels chacun, sans trop réfléchir, croit trouver une cause Une, Grande et Juste alors qu'il ne s'agit que d'un simple leurre langagier. Les Talibans se battent pour Dieu ? Il veulent le bien des hommes en leur enseignant l'unique Vérité ? Les Américains sont les champions du monde Libre ? Ils veulent le bien des hommes en leur donnant l'unique bienfait ? Y croyez-vous vraiment ?

   Pour finir je reviendrai sur un point évoqué dans la pétition et qui n'a pas manqué d'être critiqué : j'affirmais vouloir voir dans l'Islam comme dans toutes les religions, l'expression des plus hautes aspirations humaines. Je le maintiens, en apportant la précision toutefois que tout ce qui se réclame d'une religion ne participe pas systématiquement, loin de là, de ces "plus hautes aspirations humaines". Et que celles-ci ne sont pas non plus l'apanage exclusif de ces mêmes religions. Seulement ceci : il est quelques rares personnes qui, par la voie religieuse ou par une autre, savent s'élever au-dessus de ceux qui souffrent et font souffrir, pour s'approcher de l'Un. Voilà ce que je considère comme l'objectif  des "plus hautes aspirations humaines". Je ne compte pas parmi ces rares personnes. Mais je crois qu'il vaut la peine d'éviter de faire souffrir autrui, d'enseigner à autrui le peu que l'on sait sur les moyens de surmonter la souffrance. L'affirmer ne résoudra certes pas les problèmes. Le taire moins encore !


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