scène d'un spectacle de théâtre. Le Râmâyana et le Mahâbhârata
(1) ont
certainement compté parmi les premières et surtout les plus fécondes sources
d'inspiration des marionnettistes, de l'Inde jusqu'à l'Indonésie, ce qui laisse
clairement comprendre que les racines du spectacle de marionnettes en Inde sont
mythologico religieuses. Encore de nos jours c'est souvent dans le cadre de
fêtes religieuses que se donnent les spectacles, et des cérémonies
particulières, notamment destinées à Ganesh, marquent le début des
représentations.
Cependant cette origine sacrée et ses prolongements actuels ne
doivent pas faire oublier que le spectacle de marionnettes indiennes s'est assez rapidement
accompagné d'éléments profanes, qui ont pu - situation comparable à ce qu'a
connu par exemple le théâtre médiéval français - tourner au comique, et même à la bouffonnerie
avec un personnage tel que Vidouchaka
(2)
par exemple.
Il est à noter par ailleurs qu'en pays tamoul, le Roman de l'Anneau,
Shilapaddikâram - d'Ilangô Adigal évoque lui aussi, au Vème siècle, les
spectacles de marionnettes. Mais, parmi les textes anciens, c'est dans le
Kâmasûtra de Vâtsyâyana que l'on sera peut-être surpris de trouver le plus
d'informations sur les marionnettes et leur fabrication, à partir d'éléments
divers (tissus, cire d'abeilles, farine, argile, cornes animales...). Selon
l'auteur, les spectacles de marionnettes étaient un excellent moyen de divertir
les demoiselles !
Plusieurs régions en Inde
sont particulièrement réputées pour leurs marionnettes : le Tamil Nadu (Tholu
Bommalattam : theâtre
d'ombres ;
pava kôthu : marionnettes à gaine), le Karnataka (chinni patti, gombeatta...),
et surtout le Rajasthan avec les marionnettes de kâthpulî. Mais de nombreux autres
états de l'Union possèdent également leurs traditions. Il existe quatre types de
base : les marionnettes à gaines, les marionnettes à fils, à baguettes, et celles
qui sont utilisées pour le théâtre d'ombres.
Certains magiciens de rue utilisent aussi des personnages
assimilables à des marionnettes : ainsi le
Dhanu-Shara Manisha (l'homme avec un arc et une flèche) dans l'Orissa.
Cette marionnette de bois est placée face au prestidigitateur et, à la fin de
son spectacle, elle tire sa flèche... Des textes anciens évoquent également des
spectacles mixtes, mêlant acteurs et marionnettes ; c'est la cas pour la pièce
Balaramayana, du Xème siècle, ou les personnages de Sita et
Sundarika, sa belle-soeur, étaient incarnés par des poupées animées.
L'art des marionnettes
étant bien vivant en inde, il s'y exprime une créativité qui va bien sûr
au-delà des traditions. C'est notamment au début des années 1950 qu'un vent
de nouveauté s'est mis à souffler sur le petit monde des marionnettes
indiennes, notamment avec des pionniers tels que Raghunath Goswami créateur
du studio Putulpuri à Kolkata, le Maître Madhulal à Mumbai avec son
groupe Indian Institute of Puppet, Devilal Samar à udaipur au
Rajasthan, fondateur du centre Bharatiya Lok Kala Mandal, et Meher
Rustom Contractor à Ahmedabad qui eut l'initiative de doter la Darpana
Academy of Performing Arts d'une branche consacrée aux marionnettes.
les évolutions on aussi bien touché la fabrication et l'apparence des
marionnettes que les scénarios des spectacles. Bien évidemment, ces formes
contemporaines coexistent avec les spectacles les plus traditionnels.
(1) : Le
Mahâbhârata fait lui-même allusion à
des marionnettes, ce qui prouve que leur existence est antérieure à son élaboration.
(2)
: Voici commet est décrite la marionnette Vidouchaka :
"C’est un brahmane, nain et bossu, avec d’énormes dents, des
yeux jaunes et complètement chauve. Il est ridicule par ses expressions, son
costume et surtout sa goinfrerie. Il est concupiscent et lubrique, très bête
mais très rusé. Moqueur et grossier ; il bat tout le monde ; il s’exprime en
langage pracrit au lieu du sanscrit qui était la langue des brahmanes."
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