1-Les noms en Inde

L’Indien qui débarque dans les Colonies françaises ou anglaises est  immédiatement confronté à une problématique nominative. Dans son pays d’origine, il se nomme, supposons                 , fils de                                         , en revanche à La Réunion, il lui faudra de l’imagination pour décliner son identité.

Le système nominatif français, est différent du sien. Les noms, sous une forme proche de celle que nous leur connaissons actuellement, se sont fixés au Moyen Age. Étant donné la nouveauté et l’importance de cette forme de dénomination des individus, on peut parler de révolution patronymique. L’apparition des noms de famille se réalise avec la généralisation d’un système à deux éléments, le prénom individuel et le nom familial. Le passage du surnom individuel au nom de personne puis au nom de famille ne se produit pas simultanément dans toutes les régions. Ainsi la transmission héréditaire du surnom, devenant patronyme, ne peut être datée avec précision. Le nom (ou nomen proprium) est ainsi peu à peu devenu notre prénom et le surnom[1], à l’origine largement individuel (cognomen) s’est transformé en un patronyme héréditaire, transmis de père en fils. Ces informations ont été apportées lors du premier colloque interdisciplinaire organisé en France en décembre 1998 intitulé « Le patronyme, histoire, anthropologie, société », portant sur le patronyme sous ces divers aspects. Nous savons qu’il a fallu plusieurs siècles pour que le système onomastique moderne qui repose sur le binôme (nom de baptême + nom de famille) s’affirme en Europe.

Dans le cas, de notre immigré, quel est le nom et quel est le prénom ? Lequel de la poule et de l’œuf ? 

Nous ne reviendrons pas sur toutes ces notions, que les natifs indiens connaissent bien. Les noms qui sont déclinés renvoient aux familles, aux métiers, aux castes, donc à la tradition. Nous savons que des noms de caste, par exemple ont été conservés par les engagés, en tant que nom de famille. Nous devons aussi prendre en compte, que le nom varie selon la personne déclarante, pour le père, cela parait normal. Dans le cas, de La Réunion, en revanche de nombreux Indiens ont hérité de matronyme. Il parait surprenant pour un homme dans les rues de Madras, ou de Pondichéry d’affirmer qu’il s’appelle Allamélou ou Rickmouni. De plus, les agents recruteurs, à La Réunion, dans le traitement de l’information, appliquaient le même traitement pour tous les noms des engagés Indiens, sachant qu’ils venaient de régions différentes (Kerala, Andra Pradesh, Tamil Nâdu, Bengale).

On ne rappellera jamais assez, qu’avant son départ pour les îles, l’Indien n’avait aucun problème avec son nom. On savait qu’untel se prénommait tel nom, qu’il était le fils de… généralement de telle caste.  Robert Deliège rapporte que dans les premiers recensements de la population, les Britanniques, « amateurs de littérature ancienne » (sic), avaient demandé que les gens indiquent leur varna. « De nombreuses castes inférieures en profitèrent pour s’inventer un pedigree de brahmane ou kshatriya ». Ce phénomène n’est-il pas à mettre en liaison, dans une certaine mesure, avec les titres que les souverains du Moyen âge octroyaient à leurs courtisans pour les remercier de tel acte de bravoure ou de fidélité ? Les rangs (ou castes) des vicomtes, marquises et autres seigneurs grossissaient par ces récompenses.  Ainsi naissait le célèbre proverbe connu des généalogistes « dans chaque famille il y a un pendu et un roi ».


[1] BECK Patrick , M. BOURIN, P. CHAREILLE, «Nommer au Moyen Age  : du surnom au patronyme» in Le Patronyme, Op. Cit., p. 13


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