Lettre à l'aimée

Je ne veux pas t'oublier mais je t'oublie un peu tous les jours. Je ne sais trop pourquoi mais c'est plus fort que moi. Je n'y peux rien. Je m'efforce de penser à toi, de t'aimer encore, je fais de mon mieux, vraiment, mais tu t'en vas. J'ai envie que cet amour dure, envers et contre tout. Qu'il soit éternel. Un absolu. Il me le faut sinon tout le reste n'a plus de sens. Sinon cette vie n'a plus de sens. Je veux t'aimer. Encore. Tout le temps. J'ai envie de me consumer à l'orée du souvenir. J'ai envie d'être ainsi, comme un enfant ou comme un fou, qui réclame ce qui n'existe pas, ce qui ne peut pas exister. Mais le temps est plus fort. L'amour s'en va. Tout passe, tout casse, n'est-ce pas ? Et je n'y peux rien. Il a donc suffi de peu. De quelques mois pour que je t'oublie. Pour que je cesse de penser à toi. Pour que je cesse de croire que tu es mon tout. Il a suffi de peu. Je retourne parfois aux lieux de notre amour. Je sais que c'est ridicule. J'y vais et j'attends. Je ne sais trop pourquoi mais j'attends. Et il ne se passe rien. Rien. Qu'en est-il de toutes nos promesses ? Qu'en est il des sentiments ? Est-ce qu'il a donc suffi de quelques mois pour détruire tout ce qu'on a construit, tout ce qu'on a imaginé, rêvé ? Est-ce si simple que ça ? Suis-je donc égoïste, indifférent ? Il y comme un vide en moi. Ou est-ce un abysse ? Je ne ressens plus rien. Et ce n'est pas juste. Crois-moi. Je ne comprends plus rien. Je ne me comprends plus. Et j'ai envie de t'aimer. J'ai envie que cet amour dure. Est-ce que tu m'écoutes ? Es-tu là encore seulement pour justifier mon existence ? J'ai peur désormais parce que je sais que le temps dévore tout. Je le sais. Je comprends maintenant son efficacité, sa perversité. Le temps est une machine à broyer l'amour. Il y a et il y aura des lendemains. Il y a ceux qui disent qu'on n'oublie jamais mais je n'y crois plus. On oublie parce que le temps instille l'oubli. Le temps nous inscrit dans son rythme et ses illusions. Et on se réveille un jour pour découvrir qu'on n'aime plus. Et on n'arrive pas à comprendre. Et je ne comprends pas. Je ne suis plus jeune. Je ne crois pas être naïf. Mais le temps m'a pris à la gorge et m'a flanqué à la gueule cette leçon, sa vérité. Mais j'ai envie de t'aimer encore. De massacrer mes lèvres pour qu'elles ressassent sans fin ton nom. De me dire encore que tu es le sens de ma vie, que sans toi rien de sens. J'ai envie de pouvoir le dire encore. Et d'y croire. Car j'avais la foi. Mais je ne crois plus. Tu n'es plus et je ne t'aime plus. Je t'ai oubliée. Je ne pense plus à toi. Je suis désolé. Pardonne-moi.

Je n'irai pas au cimetière demain matin. Cela ne sert à rien.


 

© Umar Timol - www.umartimol.netfirms.com
 


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