(suite)
QUELQUES DONNEES SOCIALES ET ECONOMIQUES :
DE LA BOUTIQUE TRADITIONNELLE A LA
DIVERSIFICATION OBLIGEE
 

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en juger d’après l’image d’Epinal de la "boutique z’arabe", on croirait facilement en un atavisme qui ferait des Gujerati des commerçants nés. Il est exact que l’on a affaire à un peuple de très ancienne tradition maritime et marchande, tourné depuis toujours vers le monde extérieur et riche d’un savoir-faire remarquable dans la manufacture et le négoce des textiles (le coton tout spécialement) et de la confection. Mais c’est oublier un peu vite que les immigrants sur l’île étaient, eux, des agriculteurs, poussés hors de leur terre natale par des nécessités économiques ou démographiques, par la misère et les dissensions avec la population hindoue, non par un quelconque choix de stratégie commerciale. "Le prétendu don naturel pour le commerce qu’on prête aux Z’Arabes s’est forgé sur le terrain", écrit à juste titre Alain Foulon dans Religions à la Réunion, Le Renouveau. (Photo1, photo2, photo3).

   Ces anciens cultivateurs sont donc venus prospecter, et les premières familles, Zafar et Fahim, ont dû estimer la place prometteuse en ces années 1850-1870, puisqu’ils ont, en véritables pionniers, jeté les bases d’échanges triangulaires entre l’Inde, Maurice et la Réunion.

   Alors seulement est née l’expérience devenue tradition. Non sans quelques regrets pour les vieilles racines terriennes, à l’origine de diverses tentatives pour conquérir sur le sol réunionnais le lopin ou la plantation qui auraient témoigné d’un symbolique succès au bout des pérégrinations et des renoncements. Tentatives toutes vouées à l’échec, à plus ou moins long terme. Aujourd’hui, à ma connaissance, plus aucune famille indo-musulmane ne se trouve à la tête d’une exploitation agricole.

   Le négoce est donc devenu par excellence le secteur économique de prédilection des Z’Arabes. Ils y ont même, quelque temps, régné presque exclusivement, supplantant les Créoles installés dans la place depuis longtemps. Ils ont monopolisé l’import-export avant de devoir battre en retraite, pour ce qui est de l’alimentaire, devant la vague chinoise : les Extrême-Orientaux sont des experts en la matière.

   Aujourd’hui, nous le verrons, la situation n’est certes pas aussi reluisante, mais il est des qualités qui ne se renient pas et qui autorisent de raisonnables espoirs face au nouvel ordre économique. D’abord la capacité à s’adapter aux nouvelles lois du marché, voire à les infléchir et à les adapter aux micro-contextes locaux. L’énergie d’affronter les difficultés, l’audace de repartir de rien si nécessaire, le sens de l’effort et du travail personnel. Mais aussi la solidarité communautaire qui a permis la survie puis la prospérité du groupe... et que l’on voit peut-être s’effilocher sur ses franges, ces dernières années.

   Saint-Denis, Saint-Pierre, Saint-Louis, Saint-Paul... ont toutes leur rue commerçante où les boutiques z’arabes succèdent interminablement les unes aux autres, jamais très loin du point de repère et de ralliement que constitue la mosquée. Rue du Maréchal Leclerc dans le chef-lieu, rue des Bons Enfants dans la sous-préfecture du Sud, etc. On se trouve chaque fois au centre même de la ville, de son histoire et de sa vie.

   L’incessant va-et-vient des badauds et autres acheteurs de toutes origines et de tous âges croise les pas de dignes barbus vêtus de blanc, de femmes voilées où arborant le simple châle indien comme une longue chevelure d’étoffe tombant sur les épaules, d’enfants à toque brodée se hâtant doucement vers la médersa .

   Quand on passe le seuil des boutiques, on peut aussi bien se retrouver parmi des rayons pimpants qui ne dépareraient pas les vitrines d’une rue piétonnière d’Europe, qu’au cœur d’une pénombre tranquille et odorante, peuplée de l’ordre improbable des bazars exotiques, changeant au hasard des arrivages, aux caprices de quelque vieux propriétaire.

   Les produits et les marques sont les mêmes que ceux de Métropole, de partout... avec peut-être une place privilégiée pour la confection mauricienne. Ici s’affichent en devanture les rouleaux de cotonnades vives, là les tee-shirts et les baskets à la mode. Meubles de tous bois, à tous prix, voisinent avec l’électroménager et les ordinateurs dernier cri, dans un déballage qui s’offre à qui veut y mettre son nez, à deux pas du trottoir.

   Pour dégoter le "typique", le souvenir des "Indes réunionnaises", ou seulement l’ingrédient rare d’un plat d’outre-océan, il faut bien chercher. On trouvera quelques enseignes suggestives et, à l’intérieur de ces greniers orientaux, quelques saris et quelques statues de Ganesh ou de Shiva ; les bois ajourés de paravents abîmés, les sachets de pottu fantaisie pour le front des coquettes, et ceux de cardamome ou de cumin pour les palais gourmands...

   En période de braderie, on ne circule plus, la cohue des marchandises le dispute à celle des corps en sueur, à celle des annonces publicitaires déversées par des haut-parleurs que l’on n’écoute guère. Entre deux achats, on s’arrache la saveur croustillante des samoussas aussi bien que le pétillement d’un Coca...

   Le dimanche, au contraire, les rues désertées laissent voir ce qui disparaît les autres jours dans le tourbillon des occupations quotidiennes. On prête attention aux façades à la peinture écaillée, avec ces noms en -jee (a) - mais ils ne sont pas les seuls - authentiquement venus de la moitié nord de l’Inde; aux cases créoles vieux jaune et rouille, aux balcons de fer forgé toujours vides qui trônent au-dessus des rideaux de fer baissés. Aux jalousies de bois, d’un autre temps, qui ne laissent plus filtrer l’air que sur les vieux jours d’un aïeul assoupi devant une télé : les jeunes sont partis, au bord des rivières sous les ombrages, sacrifiant à cette nouvelle institution dominicale que partagent un nombre toujours plus grand de Réunionnais : le pique-nique... Ou peut-être sont-ils seulement dans leur nouvelle villa, plus facile à vivre, plus aérée, loin du centre urbain.



  
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